Apprentissage actif et collaboratif, partir une CdP du bon pied
*** Chronique rédigée par Catherine Rhéaume de Collecto concernant l’atelier d’Isabelle Tremblay et Audrey Girard, Cégep de Jonquière – Apprentissage actif et collaboratif, partir une CdP du bon pied ***
Isabelle Tremblay et Audrey Girard sont 2 conseillères pédagogiques (CP) au Cégep de Jonquière. Surnommées «les meneuses de CLAAC», elles sont responsables des classes d’apprentissage actif et collaboratif (CLAAC) de l’établissement. Pendant l’atelier qu’elles ont animé au Rendez-vous CP 2024, elles ont entre autres expliqué:
- le processus décisionnel qui a mené à l’aménagement de 2 CLAAC dans leur collège
- la communauté de pratique (CdP) qu’elles ont mise en place pour accompagner les enseignantes et enseignants qui utilisent les CLAAC
- le plan d’évaluation qu’elles utilisent pour évaluer les retombées des CLAAC et de l’accompagnement qu’elles offrent
Décisions entourant l’aménagement des CLAAC
Au Cégep de Jonquière, le projet d’aménagement de 2 CLAAC a pris naissance avant la pandémie et avant l’entrée en fonction d’Isabelle Tremblay et d’Audrey Girard. Quand elles ont pris le relais, leur priorité a été de consulter les enseignants et les enseignantes de l’établissement pour connaître leurs besoins. Le mot-clé qui est ressorti de ces consultations a été «flexibilité».
Le résultat: une CLAAC «à haute technologie» comptant 7 îlots de 6 places. Chaque îlot comporte 1 ordinateur,1 téléviseur tactile et 1 tableau blanc effaçable et est constitué de tables à roulettes modulables et de chaises sans roulettes, mais empilables».
Le bureau de la personne enseignante est le long d’un mur et non au centre de la classe comme cela se voit souvent. En effet, le personnel enseignant consulté ne s’imaginait pas délaisser l’enseignement magistral à 100% et était insécure à l’idée de devoir faire des exposés loin des tableaux tout en faisant dos à la moitié des élèves.
Pour le choix précis du mobilier, Audrey Girard et Isabelle Tremblay se sont inspirées de celui des CLAAC du Cégep Saint-Jean-sur-Richelieu. Pour choisir les téléviseurs tactiles, elles ont testé, avec des enseignants et des enseignantes technophiles autant qu’avec des novices, le modèle utilisé dans le Centre de services scolaires (CSS) de leur région. Celui-ci a plu à tout le monde (et les commentaires du personnel du CSS étaient très positifs également).
Les enseignants et les enseignantes du Cégep de Jonquière peuvent utiliser la CLAAC pour tous leurs cours, pour une partie des heures de cours ou de façon sporadique au cours de la session.
Audrey Girard et Isabelle Tremblay ont aménagé une 1re classe, en se disant qu’elles pourraient, en fonction de l’usage, apporter des améliorations lors de l’aménagement du 2e local l’année suivante. Finalement, leur 1er plan s’est avéré répondre aux besoins de façon optimale! La 2e classe a donc été un copier-coller de la 1re CLAAC.
Accompagnement des enseignants et des enseignantes qui utilisent les CLAAC
Audrey Girard et Isabelle Tremblay tenaient à ce que les enseignants et enseignantes impliqués dans le projet puissent avoir une libération d’une partie de leur tâche pour préparer leurs activités d’enseignement et d’apprentissage. Cela a été possible grâce au financement associé au Plan d’action pour la réussite en enseignement supérieur. Pour Isabelle Tremblay et Audrey Girard, il est clair que cela a fait partie des conditions gagnantes pour la réalisation de leur projet, même si cela n’a été possible que pendant la 1re année du projet.
Pour avoir accès à la CLAAC, les personnes enseignantes intéressées doivent obligatoirement faire partie pendant 2 sessions de la CdP animée par Isabelle et Audrey (qui offraient aussi de l’accompagnement individualisé à ces personnes, au besoin).
L’un des objectifs du projet de CLAAC est de favoriser les pratiques pédagogiques actives et collaboratives dans un espace conçu à cette fin. La CdP permet aux personnes enseignantes entre autres de découvrir ces pratiques et de se les approprier. Au sein de la CdP, les personnes enseignantes partagent leurs expériences; les bonnes comme les moins bonnes. Elles sont également encouragées à solliciter l’expertise de leurs collègues pour créer ou bonifier des activités pédagogiques.
Les membres de la CdP proviennent autant du secteur technique que du secteur préuniversitaire et de la formation générale. Isabelle et Audrey disent que les membres de la CdP apprécient l’aspect interdisciplinaire des échanges. Cela les amène à sortir de leurs habitudes et à discuter avec des personnes qui portent un regard neuf sur les enjeux qui les touchent.
Le projet a également comme objectif de documenter les pratiques pédagogiques favorisant l’apprentissage actif et collaboratif en vue de les partager à l’ensemble de la communauté enseignante de l’établissement. Cela prend la forme:
- d’une page dédiée aux bienfaits de la CLAAC sur le site du Centre TIC du Cégep de Jonquière (incluant une bande dessinée)
- d’un rapport sur l’engagement et la motivation des élèves, présenté au Comité TIC institutionnel, au Service d’animation et de développement pédagogiques et à la Régie des études.
- des capsules vidéos mettant en vedette les enseignants et enseignantes de la CdP
- des présentations lors de la journée pédagogique annuelle du collège
- des vignettes présentant des activités de pédagogie active et collaborative, concoctées par les membres de la CdP et publiées sur le site web du Centre TIC
- etc.
Les personnes enseignantes qui s’engagent dans le projet savent à l’avance qu’elles devront:
- documenter leurs pratiques
- remplir des questionnaires (leurs élèves devront le faire également)
- partager leur expérience
- etc.
Tout cela est essentiel afin que les impacts du projet puissent être évalués correctement (autant les impacts sur les pratiques enseignantes que sur la motivation, l’engagement et les apprentissages des élèves).
Évaluation des retombées du projet et de l’appréciation des personnes enseignantes et des élèves
L’évaluation de l’appréciation des personnes enseignantes et des élèves à l’égard du projet, de même que l’évaluation des retombées de la CLAAC et de l’accompagnement qu’Isabelle Tremblay et Audrey Girard offrent ont été au centre des préoccupations des 2 CP dès le départ. Elles ont conçu leur plan d’évaluation dès le début.
Les personnes enseignantes membres de la CdP doivent remplir des questionnaires Forms à la fin de chaque session de participation à la CdP et l’année suivant leur participation à la CdP. Elles doivent également se prêter à une entrevue individuelle avec leurs CP au milieu de chaque session de participation.
De plus, parmi les 14 rencontres annuelles de la CdP, plusieurs commencent par la remise d’un billet d’entrée ou se closent par la remise d’un billet de sortie. Ces billets amènent les enseignants et les enseignantes à:
- se fixer des objectifs personnels
- réfléchir à leurs apprentissages
- évaluer leurs pratiques pédagogiques
- etc.
Finalement, les membres de la CdP doivent rédiger un bilan de leur expérience à la fin de l’année.
Pour leur part, les élèves qui fréquentent la CLAAC (avec les enseignants et enseignantes membres de la CdP) doivent aussi remplir des questionnaires Forms 2 fois par session.
Chaque session, à partir des résultats des questionnaires complétés par les élèves, Ies CP produisent des rapports présentant un portrait de l’ensemble des personnes répondantes ou de l’ensemble des groupes d’un enseignant ou d’une enseignante. Ces rapports incluent toujours quelques commentaires d’élèves, comme: «Je ne pensais pas aimer la philo comme ça!» ou «Il faudrait augmenter le salaire de la prof!».
Isabelle Tremblay et Audrey Girard produisent également un rapport synthétisant les réponses des personnes enseignantes.
Les efforts entourant cet ambitieux plan d’évaluation en valent la chandelle, puisque les données qui en résultent légitiment le projet et valorisent les personnes enseignantes participantes de même que les pratiques d’apprentissage actif et collaboratif. Et comme le disait une participante de l’atelier du Rendez-vous CP 2024, le simple fait de «brancher» les enseignants et les enseignantes sur les commentaires des élèves, c’est déjà une excellente chose.
N’empêche, Isabelle Tremblay et Audrey Girard ont bien averti les participants et participantes que l’évaluation ne doit pas prendre plus d’importance que l’accompagnement offert aux enseignants et enseignantes, afin que les efforts demandés demeurent réalistes et bien investis. Les animatrices auraient aimé, par exemple, réaliser des entrevues de groupe avec des étudiants et des étudiantes, mais ont renoncé à l’idée devant l’importante charge de travail que cela impliquait (d’autant plus qu’elles devaient concevoir tous les outils d’évaluation elles-mêmes, compiler les données, etc.).
Il y a là de quoi rêver à l’instauration d’une culture d’évaluation dans nos établissements!
Les 4 règles d’or des meneuses de CLAAC
- Consulter les personnes concernées
- Ne pas avoir peur de se remettre en question
- Élaborer son plan d’évaluation avant de démarrer la CdP
- S’assurer que l’évaluation ne prenne pas plus d’importance que l’accompagnement offert
- Valoriser les initiatives et les personnes impliquées