*** Chronique rédigée par Alexandre Enkerli concernant l’atelier de Xavier Martel-Lachance du Collège Montmorency, intitulé Remettre en question certains usages et outils numériques en pédagogie. La responsabilité de répondant TIC ***
Au centre de la transformation numérique, une question clé: qui décide?
Des rapports et études, de toutes origines, peuvent guider des décisions sur l’utilisation de la technologie. Certains textes permettent de saisir les décisions prises par la fonction publique ou par l’administration de notre institution.
Bien des idées au sujet de la prise de décision ont été discutées lors de l’atelier « Remettre en question certains usages et outils numériques en pédagogie. La responsabilité de répondant TIC » de Xavier Martel-Lachance, répondant TIC au Collège Montmorency.
Discussion candide
En plus d’une présentation autour du déterminisme technologique, Xavier nous a proposé un échange (ou « débat ») autour d’enjeux d’appropriation technologique dans nos institutions. Il n’a pas hésité à décrire son attitude en termes familiers et la dynamique de cette discussion était suffisamment candide ouverte pour rappeler l’expression « on va se dire les vraies affaires ». La fraiche perspective d’un CP en début de carrière constitue-t-elle un antidote au cynisme? Les participantes et participants à l’atelier sauraient en débattre.
Des choix contestés
Parmi les difficultés relevées par Xavier, un manque à la fois de consensus et de questionnements au sujet de l’utilisation de certains outils a marqué un point de départ à la discussion collective. Citant l’exemple de quelques publications récentes glanées sur le site d’un organisme du réseau à propos de l’IA générative, Xavier notait le peu d’attention portée aux droits moraux ou aux artistes dont les droits sont, selon plusieurs, floués par l’usage de tels outils. Provenant lui-même d’un contexte créatif, Xavier perçoit l’importance d’approches larges des phénomènes qui nous affectent. Au cours de la discussion, l’intégration progressive de l’IA dans bien des outils utilisés dans le réseau a fait réagir plus d’une personne. À titre d’exemple, il a été mention du recours de certaines instances (par exemple Eductive ou à i-mersion CP pour être honnête) aux générateurs d’images par l’IA sans qu’une réflexion sur l’éthique de son emploi ait été réalisée. Si ces questions dominent l’actualité, le rôle des CP n’y fait pas la manchette.
Par la suite, un exemple moins récent autour des tableaux blancs interactifs (TBI) a permis d’identifier des effets du manque de consultation autour des choix technologiques imposés par certaines instances. Bien que le choix imposé de ces TBI soit davantage lié au réseau scolaire qu’à l’enseignement supérieur, son impact se fait sentir dans notre milieu, du moins de façon symbolique. Le denier public ayant été utilisé pour leur achat, le cas fait figure de décision financière contestable dans des esprits de CP.
D’autres décisions prises à propos des technologies utilisées semblaient démontrer des conflits entre instances, basés de part et d’autre sur des « données probantes », expression qui a attisé la discussion.
Le poids des études
Citant tour à tour le Conseil supérieur de l’éducation ou Jonathan Durand Folco et son coauteur Jonathan Martineau, Xavier a enclenché des réflexions au sujet d’approches étroites et larges des enjeux sociétaux. D’une part, la résolution de problèmes portant sur des questions restreintes. De l’autre, une approche systémique des problèmes complexes. Ce qui manque souvent, selon Xavier et d’autres membres du groupe, c’est une compréhension des enjeux soulevés par la transition vers un nouvel outil. L’appropriation technologique s’effectue plus lentement lorsque les parties prenantes ne sont que peu impliquées dans la prise de décision. D’ailleurs, la dépendance institutionnelle en certains outils peut poser des défis qui ne sont que rarement documentés par les instances décisionnelles.
Responsabilité partagée
La liberté d’action de diverses parties prenantes a aussi fait partie des considérations de la discussion. Est-ce que les CP universitaires ont une plus grande marge de manœuvre que des CP au collégial, comme Xavier? Les situations varient beaucoup. Des personnes impliquées dans les deux réseaux, y compris celles qui sont passées de l’un à l’autre, ont pu partager leurs perceptions et éviter les biais de comparaison (pelouse plus verte chez le voisin ou voisin gonflable).
Les instances administratives des établissements de notre réseau ont, elles aussi, une marge de manœuvre limitée face aux autres instances et aux entreprises technologiques. Dans un tel contexte, une approche concertée favorisant l’intelligence collective dans la gestion du changement pourrait-elle mener à des décisions plus appropriées dans leurs contextes d’application?
Selon les propos émergents de la salle, on peut percevoir le conseil pédagogique comme une identité professionnelle ambigüe lorsque nos conseils sont relégués au second plan. En tentant de participer à un processus décisionnel, Xavier se questionne sur le fait que les CP n’étaient pas systématiquement impliqués dans les processus de décisions. Pourtant, en tant que spécialistes en apprentissage, les CP ont justement un grand rôle à jouer dans de telles démarches. Le travail de terrain que nous effectuons ne pourrait-il pas être valorisé dans les études publiées par des instances supérieures?